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Editorial du « Monde ». Dans la tumultueuse histoire des relations entre la Russie et l’Occident, l’affaire Navalny – Alexeï Navalny signe aujourd’hui une courageuse tribune dans Le Monde contre Vladimir Poutine et la corruption internationale – restera probablement comme une nouvelle péripétie, un dossier épineux de plus dans la longue liste de ceux qui affectent la confiance et la relation entre les deux « camps ».
La visite qu’effectue Angela à Merkel à Moscou, ce 20 août, le montre. Malgré l’adoption de sanctions supplémentaires contre le pouvoir russe, prises pour répondre à l’utilisation d’une arme chimique prohibée, la chancelière allemande n’a pas évité le jour anniversaire de l’empoisonnement de l’opposant pour accomplir son premier voyage en Russie depuis un an et demi. Le cas Navalny y sera peut-être évoqué, mais il sera relégué derrière des sujets plus urgents et stratégiques : la situation en Afghanistan après la prise de pouvoir des talibans, et surtout la prochaine inauguration du gazoduc Nord Stream 2 entre la Russie et l’Allemagne.
Deux jours avant l’arrivée de Mme Merkel, le ministère russe des affaires étrangères a publié une longue note consacrée à l’anniversaire de « l’hospitalisation d’urgence du blogueur russe Alexeï Navalny ». Celle-ci – en réalité la tentative d’assassinat du premier opposant à Vladimir Poutine – est décrite comme un vaste complot occidental, préparé de longue date et dans lequel le premier rôle est tenu par l’Allemagne. L’un des objectifs de cette manipulation : « influencer la campagne électorale » des législatives prévues, rappelons-le, plus d’un an après l’empoisonnement d’Alexeï Navalny.
Réalité parallèle
Cette posture de déni n’a rien de nouveau. Sur un certain nombre de sujets, comme le crash du vol MH17 au-dessus de l’Ukraine, le pouvoir russe a depuis longtemps décidé de se barricader derrière les murailles d’une réalité parallèle. A force d’être répétée, la paranoïa est devenue une doctrine d’Etat. Et que les Européens soient obligés de s’en accommoder n’a rien de nouveau ni de surprenant.
Dans l’histoire de la Russie contemporaine, en revanche, l’affaire Navalny restera comme un tournant majeur. Il n’est pas seulement question ici de l’homme Navalny, de son courage et de ses prises de position politiques, mais bien des actions entreprises contre lui par l’Etat russe.
Avant le 20 août 2020, le régime de Vladimir Poutine considérait plus utile de maintenir cet opposant dans l’ombre, hors du champ politique légal. Après le 20 août, les hommes aux commandes de la Russie ont considéré que sa mort était une option plus judicieuse.
Avant le 20 août, le régime de Vladimir Poutine recherchait en premier lieu l’adhésion populaire, n’utilisant la peur que comme recours. Depuis le 20 août, les proportions se sont inversées. Le pouvoir ne cherche plus à convaincre la frange de l’opinion qui s’est détournée de lui, mais uniquement à l’intimider. La marge de manœuvre permettant de faire de la politique (ou du journalisme, ou toute action citoyenne) hors du contrôle du Kremlin a disparu.
La Russie n’est pas encore dans une situation comparable à la Biélorussie voisine, où le régime d’Alexandre Loukachenko est quasiment en état de guerre contre son peuple. Mais, comme à Minsk, la priorité du pouvoir en place est sa propre survie, quel qu’en soit le prix. Ce constat a de quoi fortement inquiéter les Européens.
via LeMonde
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