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A Andrinople, Rome vaincue par des réfugiés

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« Au printemps 376, une légation de Wisigoths arriva de la province de Mésie, près de l’embouchure du Danube, et se présenta à la cour impériale romaine, à Antioche en Syrie. Les Germains racontèrent qu’une horde sauvage venue d’Asie centrale, les Huns, avait vaincu les Ostrogoths au nord de la mer Noire et menaçait désormais les Wisigoths du même sort. Après avoir fui jusqu’à la rive nord du Danube, ces derniers demandaient maintenant à être accueillis dans l’Empire en tant que réfugiés pacifiques. »

Ainsi commençait un long article paru, le 20 janvier 2016, dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung. Son titre : « La fin de l’ordre ancien ». Son auteur : Alexander Demandt, professeur émérite d’histoire de l’Antiquité à l’Université libre de Berlin et auteur d’une trentaine d’ouvrages. Parmi eux, Der Fall Roms (La Chute de Rome), publié en 1984 et plusieurs fois réédité depuis, faisait l’inventaire des théories avancées au fil des siècles pour expliquer le déclin de l’Empire romain. A l’époque, l’historien en avait recensé 210…

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De cette multitude d’interprétations, il n’est plus question. Trente-deux ans après la sortie de son vaste panorama historiographique, Alexander Demandt montrait qu’il avait clairement choisi son camp. Pour cet amateur d’histoire contrefactuelle, grand admirateur du philosophe allemand Oswald Spengler (1880-1936), auteur d’un célèbre essai consacré au Déclin de l’Occident (1918-1922 ; Gallimard, 1931), la cause des malheurs de Rome a un nom : l’immigration massive des IVe et Vsiècles. Et voici comment il l’explique.

Un mouvement irréversible

En 376, donc, les Wisigoths pourchassés par les Huns frappent à la porte de l’Empire. A la cour, affirme l’historien, certains s’opposent à leur accueil. Mais ils sont minoritaires face à ceux qui voient dans ces migrants des mercenaires et des contribuables potentiellement utiles. Sans compter ceux pour qui l’empereur, « par charité chrétienne, ne doit pas seulement penser au bien-être des Romains mais prêter assistance à tous ceux qui sont dans le besoin ». La décision est donc prise : « Les frontières furent ouvertes, les Goths affluèrent. L’administration romaine essaya de compter les arrivées. Mais l’action échappa à tout contrôle. »

A lire Alexander Demandt, cette décision déclencha un mouvement irréversible. Bientôt, écrit l’historien, « les Goths commencèrent à piller et des violences éclatèrent ». Deux ans plus tard, le 9 août 378, l’armée romaine fut vaincue à Andrinople, et l’empereur trouva la mort sur le champ de bataille. La mécanique de l’effondrement était en place. « Malgré cela, la frontière sur le Danube resta ouverte. (…) En 406, celle du Rhin n’était plus étanche. La migration des peuples était en marche. La conquête ne prit fin qu’en 568 avec l’arrivée des Lombards en Italie. »

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via DakarXIbar

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